1. Une Autorisation Encadrée : L’Appel d’Air pour un Marché Plus Structuré
La décision de régulariser un commerce borderline, souvent qualifié d’informel, vise probablement à mieux encadrer et structurer un secteur qui existe déjà, mais dans l’ombre de l’économie officielle. L’Algérie d’aujourd’hui n’est effectivement plus celle des pénuries des années passées. Cependant, cette régularisation s’accompagne de plusieurs questions et contradictions, notamment sur le contrôle des produits importés et leur gestion dans le pays.
- Un appel d’air pour une activité accrue : Si cette activité devient officielle, il y a un risque qu’elle attire davantage de commerçants, ce qui pourrait mener à un marché encore plus massif et difficile à contrôler. Si l’on estime que ce marché représente aujourd’hui 2 milliards de dollars, il est plausible qu’il double avec l’officialisation, comme tu l’as mentionné. Cela risque de renforcer encore la dépendance aux importations, d’autant plus que ce sont souvent des produits à faible valeur ajoutée comme des friandises, des produits de beauté, des vêtements, et des babioles bon marché.
2. Contradiction avec la Politique de Réduction des Importations
La volonté de réduire les importations est un objectif gouvernemental majeur pour renforcer la production locale, réduire la dépendance à l’extérieur et améliorer la balance commerciale du pays. Cependant, autoriser une activité qui repose sur des produits importés semble contredire cette politique. En effet, l’officialisation pourrait encourager la demande en devises étrangères, ce qui alimenterait potentiellement des circuits informels, comme la vente de devises au square, en alimentant indirectement le marché parallèle de la monnaie.
- Impacts sur l’industrie locale : Si l’on considère que certaines politiques d’interdiction d’importation ont bénéficié à l’industrie locale, notamment dans des secteurs comme l’agroalimentaire, l’habillement ou la cosmétique, une régularisation mal gérée pourrait en inhiber les progrès. Pour que cette régularisation ne soit pas contreproductive, il faudrait veiller à ce qu’elle n’affecte pas l’élan de développement industriel national. Il est donc crucial de concilier cette officialisation avec un encouragement à la production locale de biens similaires.
3. Le Contrôle des Produits Importés : Une Nécessité
L’un des aspects les plus importants pour que cette réforme soit efficace et bénéfique pour l’Algérie serait de mettre en place des contrôles rigoureux sur les produits ramenés par ce circuit semi-officiel. Cela comprend :
- Inventaire des produits importés : Créer un système permettant de suivre et répertorier les produits qui transitent par ce circuit pour mieux les contrôler. Il serait utile d’avoir une base de données centralisée qui permette de vérifier, par exemple, la quantité et la nature des produits (alimentation, cosmétiques, etc.) qui entrent dans le pays.
- Contrôles sanitaires : Les produits alimentaires, en particulier, présentent un risque sanitaire (chocolat, bonbons, produits périssables). Il serait donc nécessaire de mettre en place un système de certification pour garantir que les produits respectent les normes de sécurité. Des contrôles aléatoires sur les lots de marchandises seraient également nécessaires, ainsi qu’une collaboration avec les associations de consommateurs pour sensibiliser les opérateurs et les consommateurs aux risques sanitaires.
- Suivi des produits de consommation : Par exemple, certains produits comme les médicaments, les cosmétiques ou même les accessoires électroniques peuvent constituer un danger sanitaire (produits contrefaits, mal conservés, etc.). Il est donc essentiel de garantir que ces produits ne représentent pas un risque pour la santé publique. L’un des moyens d’y parvenir est de simplifier les normes d’étiquetage et de permettre un contrôle de qualité aléatoire, sans pour autant empêcher l’activité.
4. Les Avantages Potentiels de l’Officialisation
Malgré les défis et contradictions que cette mesure peut soulever, il existe des opportunités significatives si cette réforme est menée intelligemment :
- Accès aux canaux formels de distribution : Une régularisation permettrait aux produits importés par le biais de ce commerce d’accéder à des canaux de distribution formels, comme des magasins ou des boutiques en ligne, ce qui augmenterait la sécurité des consommateurs.
- Réduction du marché parallèle de la monnaie : En régularisant ce marché, l’État pourrait peut-être mieux encadrer les flux de devises et limiter les pratiques de vente de devises au marché parallèle (par le square).
- Stimulation de la production locale : Une partie des bénéfices de cette régularisation pourrait être réinvestie dans l’industrie locale, notamment pour améliorer les produits locaux et les rendre plus compétitifs face à l’offre étrangère.
Conclusion : Une Réforme à Double Tranchant
En conclusion, la décision de régulariser le commerce du cabas est une initiative complexe, pleine de potentiel mais aussi de risques. Pour qu’elle soit réussie, il faudra une gestion fine et stratégique, notamment en ce qui concerne le contrôle des produits, l’évaluation sanitaire et la protection de l’industrie locale. Si cette réforme est menée avec une vision claire et un suivi rigoureux, elle pourrait s’avérer être un moteur pour la transition vers une économie plus formalisée, tout en permettant de répondre aux besoins réels de millions de citoyens algériens.